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LE B.A.BA À CONNAÎTRE POUR OPTIMISER SON REVENU FISCAL

Si vous prévoyez une augmentation de cheptel, ne ratez pas l'occasion de la DPI ouverte sur les stocks à rotation lente. Il n'y a pas à la réintégrer dans le revenu imposable.© SÉBASTIEN CHAMPION

L'optimisation du revenu fiscal est revenue au coeur des préoccupations. L'occasion pour l'Afocg 25 de rappeler les principaux leviers à actionner avant de déposer sa liasse fiscale.

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L'AMÉLIORATION SENSIBLE DU PRIX DU LAIT DEPUIS DEUX ANS ET DE CELUI DE LA VIANDE ont remis au coeur des préoccupations l'optimisation du revenu fiscal. Témoins les formations de groupes sur ce sujet, organisées cet hiver par le réseau Afocg(1), notamment dans le Doubs. Il est vrai qu'ici, les « heureux » producteurs de lait AOC comté flirtent depuis deux ans avec une moyenne de 450 €/1 000 l. « À chacun de savoir définir ses objectifs de résultat fiscal selon sa situation », insiste Béatrice Sage, animatrice à l'Afocg 25(1). D'où l'importance de fixer sa propre stratégie en fonction de différents critères : situation de l'exploitation (projet d'un bâtiment ou augmentation de cheptel, investissements prévus dans du matériel), niveau d'imposition IRPP ou de contribution MSA, situation familiale (âge, enfants scolarisés…). « Mais aussi en fonction du niveau de risques que l'on est prêt à prendre, ajoute l'animatrice. Certains gèrent très bien le fait de faire des DFI sans avoir vraiment d'investissements programmés. D'autres veulent avoir le bon de commande… »

Ce préambule posé, il existe une palette d'outils à actionner. Voici les principaux pour lesquels Béatrice Sage vous donne ses conseils.

1. LA DÉDUCTION POUR INVESTISSEMENT

La DPI, appelée aussi DFI (déduction fiscale pour investissement), permet aux exploitants au réel de déduire, chaque année, une fraction de leur résultat fiscal pour financer des biens amortissables, des stocks à rotation lente (plus d'un an) ou des parts sociales de coopératives. Cette DPI doit ensuite être réintégrée au revenu fiscal dans les cinq ans qui suivent sa réalisation. Son montant est fonction du résultat d'exercice défini selon un barème précis avec un plafond. Pour des exploitations individuelles, il est fixé à 40 % du bénéfice si celui-ci est compris entre 10 000 et 40 000 € (8 000 € + 20 % de bénéfice entre 40 001 et 60 000 € de bénéfice). Pour les Gaec et EARL, le plafond est multiplié par le nombre d'associés dans la limite de trois.

Pour des immobilisations amortissables (achat de matériels neufs ou d'occasion, construction de bâtiments), la DPI doit être réintégrée dans le résultat fiscal au même rythme d'amortissement que celui de l'immobilisation correspondante. Concrètement, elle vient donc en déduction des amortissements réalisés.

Pour des stocks à rotation lente (accroissement du cheptel), la DPI n'est pas réintégrée et totalement acquise. Concrètement, il suffit de constater, à la clôture d'un des exercices suivants (avant cinq ans), l'augmentation de la valeur de ces stocks. C'est donc du revenu sorti de l'assiette de calcul de la MSA et de l'impôt.

Pour des parts sociales, la réintégration de la DPI doit s'effectuer par parts égales sur le résultat de l'exercice qui suit la souscription ou l'acquisition de ces parts et des neufs exercices suivants. En pratique, le résultat de chacun de ces exercices sera majoré d'un dixième de la DPI.

Dans ces trois cas, les sommes non affectées doivent être rapportées au résultat de la cinquième année qui suit la réalisation de la DPI. Il est aussi possible de faire une réintégration anticipée sous certaines conditions.

- Quand l'utiliser

« Si vous prévoyez une augmentation de cheptel, ne ratez pas l'occasion de la DPI ouverte sur les stocks à rotation lente. Si vous attendez que cet accroissement soit effectif pour penser DPI, vous ne pourrez pas l'y affecter. Il est beaucoup plus judicieux d'anticiper les choses pour bénéficier de cet avantage fiscal. »

- Quand l'éviter

« S'il n'y a pas d'investissement prévu ou justifié. La DPI est une déduction ponctuelle sur une année qui revient au bout de cinq ans maximum gonfler le revenu fiscal… et réduisant d'autant la base d'amortissement. Investir dans un tracteur superflu ou d'une puissance supérieur à ses besoins coûte non seulement plus cher en frais de fonctionnement (entretien, carburant), mais aussi du fait du remboursement de l'emprunt contracté qui eux courront plusieurs années. »

2. LA DÉDUCTION POUR ALÉAS

La DPA permet aux exploitants au réel de déduire, chaque année, une fraction de leur revenu fiscal pour faire face à des aléas d'ordre climatique (calamités agricoles ou naturelles…), sanitaire (maladie des animaux ayant fait l'objet d'un arrêté…), économique (résiliation du bail…), voire familial (divorce, invalidité…). Contrepartie obligatoire et logique, mais qui en rebute beaucoup : souscrire une assurance dommages aux récoltes, mortalité du bétail et contre l'incendie pour toute l'exploitation. À la différence de la DPI, la somme déduite doit être déposée sur un compte en banque. Le montant de la DPA est plafonné, par exercice de douze mois, à 23 000 € dans la limite du bénéfice imposable (à multiplier par le nombre d'associés pour les sociétés). Comme la DPI, la déduction pour aléas impacte le résultat servant d'assiette aux cotisations sociales et aux impôts. La DPA doit s'utiliser dans les dix ans suivant sa réalisation.

- Quand l'utiliser

« Son champ est restreint mais néanmoins intéressant quand on a un excédent de trésorerie suffisant. Le montant de la DPA doit être déposé sur un compte épargne en banque dans les six mois qui suivent la clôture de l'exercice. Elle est soumise à une obligation d'assurance couvrant les cultures et le risque incendie qui a un coût. »

- Quand l'éviter

« Tant que les DPI peuvent intelligemment jouer pour lisser le revenu et ainsi limiter la progressivité de la MSA et de l'impôt. La déduction pour investissement est un outil plus simple et plus souple que la DPA. Mieux vaut, quand on le peut, placer l'excédent de trésorerie sur un dépôt à terme utilisable à tout moment et hors des clauses restrictives de déblocage de la DPA. Mais cela n'ouvre droit, en revanche, à aucun avantage fiscal. »

3. LE CHOIX DE LA DATE DE CLÔTURE

C'est un outil très efficace pour diminuer fortement le revenu fiscal de l'exploitation. Les règles fiscales imposent en effet pour payer annuellement son impôt, qu'une exploitation sorte au minimum un résultat par année civile. Cependant, l'exercice peut être seulement de quelques mois (par exemple du 1er janvier au 31 mars 2012). Cet exercice court détermine le résultat de l'année civile 2012 qui servira de base pour le calcul de l'impôt et de la MSA. L'exercice suivant du 1er avril 2012 au 31 mars 2013 comptera pour l'année 2013. L'activation de cet outil est souple pour un exploitant individuel. Avant la date limite de dépôt des déclarations fiscales, il peut choisir de réduire la durée de son80 l mai 2012 l numéro 202 l L'éleveur laitier exercice. Le dépôt de la liasse fiscale à la nouvelle date de clôture (avec une lettre envoyée aux impôts) suffit à entériner le changement. Pour les sociétés, un formalisme spécifique est en revanche exigé. La décision de modifier la date de clôture inscrite dans les statuts doit être approuvée en assemblée générale. Cette opération doit aussi être réalisée avant la date de clôture de l'exercice en cours. Pas question donc pour un Gaec ou une EARL de se décider en fin d'année 2012 pour clôturer au 31 mars de la même année.

- Quand l'utiliser

« Si ponctuellement, sur une année, on veut une baisse signifi-cative du revenu servant de base au calcul de la MSA et des impôts. C'est un levier d'action plus important qu'une DPI. Il faut le privilégier les années où s'annonce un très bon revenu et que l'on a épuisé l'option DPI-DPA. C'est aussi un moyen efficace pour redonner du souffl e à une trésorerie tendue d'une exploitation qui, par ailleurs, dégage un bon niveau de revenu. Le revenu diminué de l'exercice écourté, entraîne par ricochet une diminution de cotisations MSA à payer l'année suivante, qui redonnera de l'air à l'exploitation. L'effet à attendre est d'autant plus marqué que l'agriculteur a opté pour une assiette annuelle (et pas triennale) de calcul de ses cotisations. »

- Mise en garde

« Changer de date de clôture n'est pas une décision banale du fait des incidences fiscales et sociales attendues. C'est un outil d'action ponctuel qui n'est efficace que la première fois qu'on l'utilise. Il engage aussi des frais de comptabilité supplémentaires, ce qui n'est pas le cas des DPI ou DPA. »

4. LA LOI MADELIN AGRICOLE

Elle ouvre la possibilité aux chefs d'exploitations, leur conjoint et les aides familiaux non salariés agricoles de souscrire à un dispositif d'épargne retraite. Il consiste à verser des cotisations qui ouvrent droit, à la retraite, au versement d'un complément de revenu sous forme d'une rente viagère individuelle (possibilité de rente réversible à la personne de son choix).

Les cotisations de ce système de retraite facultatif par capitalisation sont déductibles de la base de calcul des impôts et de la MSA dans la limite d'un plafond, qui dépend de celui de la sécurité sociale. Leur montant et leur périodicité sont modulables, les versements complémentaires possibles. Mais il s'agit d'une épargne bloquée.

- Quand l'utiliser

« Quand la priorité est de préparer sa retraite, tout en bénéficiant d'une déduction fiscale et sociale. »

- Quand l'éviter

« Si la priorité est de diminuer de façon substantielle le revenu fiscal. Ce n'est pas à cinq ans de la retraite qu'il faut y penser. »

5. LE PLAN ÉPARGNE ENTREPRISE

La souscription à un PEE s'adresse aux exploitations avec salariés. Il permet à ces derniers de se créer une épargne pour une durée minimale de cinq ans, avec récupération des fonds sous forme de capital ou de rentes au plus tard lors de la retraite. Les versements de l'entreprise (abondement) sont déductibles du bénéfice imposable, exonérés d'impôt et non soumis aux charges sociales. Les sommes alimentant le PEE proviennent des versements volontaires des salariés (dans la limite de 25 % de leur revenu annuel), des revenus tirés du placement et des versements effectués par l'employeur.

Avantage pour le chef d'entreprise : il peut, comme ses salariés, bénéficier du PEE à titre personnel. Mais ses versements ne sont pas déductibles. Les sommes bloquées peuvent faire l'objet d'un retrait anticipé sans perte des avantages fiscaux dans certains cas précis.

- Quand l'utiliser

« L'abondement de l'entreprise est un excellent outil pour motiver un salarié que l'on veut garder. Il se constitue ainsi une épargne en partie financée par son entreprise. »

JEAN-MICHEL VOCORET, AVEC LA COLLABORATION DE L'AFOCG 25

(1) Association de formation à la comptabilité et à la gestion du Doubs. Le réseau national Afocg compte dix-sept associations.

Le recours à la déduction pour aléas (DPA), comme pour une sécheresse par exemple, est conditionné à la souscription d'un contrat d'assurance des récoltes, du bétail et contre l'incendie.

© SÉBASTIEN CHAMPION

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